Ma première journée à Forest Hill avait bien commencé. J’avais amené Maïa à l’école et j’étais allé découvrir le lac qui était proche de chez moi. J’y avais même rencontré une femme, ou plutôt une créature bénéfique, avec qui j’avais échangé quelques politesses et quelques informations.

Alors que je poussais la porte de ma maison, je me dis que je devais absolument prendre davantage d’informations. Après tout, si j’étais arrivé à Forest Hill, c’était pour des raisons particulières. Alastair, mon mentor, m’avait expliqué que, dans cette ville plus qu’ailleurs, on avait à la fois besoin de mes qualités humaines et de mes qualités magiques.

C’était une preuve de confiance indéniable. J’étais pourquoi un jeune être de lumière, puisque six mois, c’était rien par rapport à d’autres de mes collègues. Mais ma volonté avait du les convaincre et c’est ainsi que j’étais arrivé ici.

Alastair devait venir pour m’expliquer la situation à Forest Hill. Il m’avait dit qu’il viendrait lorsque je serai disponible. Je n’avais qu’à l’appeler. Si j’avais bien compris, puisqu’il était mon mentor, il pouvait, comme un être de lumière avec ses protégés, me localiser. Sortant deux verres de mes placards, je l’appelais alors:

”Alastair ? Si tu es disponible, je le suis également !”

J’avais préféré attendre que Maïa soit à l’école. Elle avait beau être habituée au monde de la magie, à présent, c’était ma façon de la protéger. Je n’utilisais jamais la magie devant elle. Du moins, plus depuis que je lui avais expliqué qui j’étais maintenant. Je devais d’ailleurs trouver une nouvelle personne, faisant partie du monde magique, qui pourrait me la garder lorsqu’un de mes protégés m’appellerait en urgence. Je comptais d’ailleurs en parler à mon mentor.

J’étais un novice. Pour le moment, je n’avais jamais eu aucun protégé mais je savais que ce moment ne tarderait pas. Bien sûr, cela me stressait. J’allais devoir épauler un être surnaturel, une sorcière ou un sorcier, et même si les fondateurs m’avaient donné accès à toutes mes vies antérieures et que, par ce don, j’avais obtenu des connaissances sur ce monde, cela me rendait tout de même un peu nerveux. C’est pourquoi je n’hésitais pas à aller dans l’école de magie afin de parcourir quelques livres et de prendre le maximum d’informations qui pourraient m’aider à épauler mes futurs protégés.

Cette même envie d’être au point le jour où je me verrai confier une mission m’avait également poussé à contacter mon mentor, Alastair. Si j’appréciais beaucoup cet homme, nous n’avions que rarement pu aborder des sujets autres que ceux de mes pouvoirs, puisque c’était lui qui m’avait entraîné pour notamment apprendre à maîtriser ma téléportation.

Aussi, lorsqu’Alastair apparut dans ma pièce principale, je l’accueillais avec un grand sourire, et je lui tendais la main pour le saluer. J’étais heureux qu’il puisse répondre à ma demande aussi rapidement, et je me disais qu’il me restait du temps avant d’aller rechercher Maïa à l’école.

”Je suis content que tu sois disponible aussi rapidement, Alastair. Tu veux quelque chose à boire pendant que nous discutons ? J’ai fait quelques courses.”

L’être de lumière me demanda alors si j’avais une raison particulière de l’appeler ou si je voulais juste discuter. Me servant un verre de soda, je m’assis sur un des sièges de bar, je répondis alors:

”A vrai dire, j’aimerais avoir davantage d’explications sur cette ville. Je suis sorti pour la première fois ce matin, et j’ai déjà rencontré une créature surnaturelle. Si vous m’avez fait venir ici, on est d’accord que c’est parce que cette ville n’est pas une ville ordinaire ? A quoi dois-je m’attendre ?”

Deux questions, assez simples en apparence, mais quelque chose me disait que mon mentor allait avoir besoin de temps pour y répondre. Je le sentais. La magie était omniprésente dans cette ville, et même si mon statut d’être de lumière me permettait d’avoir des intuitions, je ne pouvais néanmoins pas mettre de mots sur ce qu’il se passait …

Je fis signe à Alastair de se poser à son tour sur un autre tabouret de bar et j’attendis patiemment ses réponses. Quelles qu’elles soient, je savais que ces dernières me permettraient de mieux comprendre tout ce que je ressentais en moi.

J’ignorais totalement dans quoi j’avais mis les pieds. Je ne connaissais ni les tenants ni les aboutissants de ma présence ici, ni même de celle d’Alastair. J’avais pleinement conscience que les choses allaient être compliquées et que ma vie serait chamboulée. Mais à quel point ?

Me servant un thé glacé à la pêche, je rangeais le verre refusé de mon mentor et je m’installais face à lui, impatient et curieux de connaître l’histoire de cette ville, c’est en silence et tout ouï que j’écoutais, et je fus surpris d’entendre parler de 1692 … Je n’étais pas forcément un historien passionné, mais qui ne connaissait pas l’histoire de la chasse aux sorcières de Salem ?

Ainsi, les sorcières avaient construit une ville uniquement pour les êtres magiques ? Et cette ville était Forest Hill ? Waouh … Voilà qui était des plus étonnants. Je ne m’attendais pas du tout à cette histoire, loin de là. Je restais donc un moment silencieux, un long moment … Je sirotais tranquillement mon thé glacé, le regard plongé dans le vide, essayant de ranger chaque information à sa place.

Puis, lorsque la surprise laissa place au questionnement, je formulais mes interrogations avec respect envers mon mentor:

”Mais … Cette ville est-elle toujours cachée aux yeux des humains ? Car en amenant Maïa à l’école, je n’ai pas eu l’impression qu’il y ait de la magie partout … Enfin … Je t’avoue que j’ai du mal à comprendre tout cela. Qu’attends-tu de moi ici ? Enfin, je sais qu’il ne s’agit pas que de toi, j’ai bien compris, mais … Je suis novice, tu le sais bien. S’il y a tant de tensions, pourquoi avoir choisi un être de lumière qui n’a même pas eu encore de protégés ?”

Mes questions n’étaient pas condescendantes, loin de là. Je me demandais juste quel était mon rôle, pourquoi moi ? Je ne me débinais pas, ce n’était pas mon style. Je ferais ce que l’on me dirait de faire. J’étais une personne qui respectait le règlement et qui était loyal.

”Quant à limiter les dégâts … Qu’entends-tu par cela ?”